L’an dernier, en pleine préparation pour le marathon de Valence, je m’étais blessée (fracture du bassin). Du coup, pas de marathon et une saison 2017-2018 complètement blanche en termes de course à pied. Il a donc fallu repartir de zéro. J’ai repris doucement par de la nage et du vélo en début d’année. Puis quelques footings à partir d’avril pour être capable de terminer mon seul objectif de l’année : le half-altriman (lire ici). Après un été à rouler dans les Pyrénées (lire ici), il était grand temps de reprendre la course à pied et faire appel à mon coach Jérôme Amathieu : son défi ? Me faire un plan pour revenir au niveau et battre mes records sur 10K et Semi-marathon, et dérouler avec un marathon en bonus. Trop facile pour un doctorant comme lui, alors je lui complique la tâche avec des voyages (le Terre Iblee Tour en Sicile, lire ici) et des objectifs mouvants (date de marathon inconnue). Toujours trop facile pour ce coach ultra zen, on décide de faire une prépa allégée de façon à soulager au maximum mon bassin et compenser par le vélo et la natation. Bref, c’est un peu la lettre au Père Noël ! Jérôme me concocte donc un « plan magistral ». Et tout va s’enchaîner assez vite …
Une prépa au top !
La préparation débute fin août en douceur. Une petite course insolite : la montée du phare chez moi en Bretagne, histoire de remettre un dossard en s’amusant ! Les sorties en bord de mer motivent, ça fait du bien de recourir librement. Les premiers fractionnés font mal, heureusement que je suis accompagné par mon partenaire Philou. Lui aussi reprend, ça tombe bien ! Au bout de quelques semaines, on décide de voir où j’en suis avec le 10KM de Tournfeuille (lire ici). Surprise, la forme est déjà là, bien plus tôt que prévue (les objectifs ne sont qu’en novembre !). On décide d’enchainer avec le semi-marathon de Toulouse (lire ici) pour se donner une chance de performer. Le chrono est correct, la forme un peu moins, le mental au plus bas. Sans compter que les inscriptions pour Valence sont clôturées. C’est la panique. On repart au travail, focalisée sur les objectifs de Novembre. Mon partenaire Philou ne suit plus, je me retrouve seule sur cette prépa. La météo est moins bonne, je fais moins de vélo, plus de course à pied. Les entraînements se passent bien et les premières sorties longues apparaissent. Le 10K de la Méridienne (lire ici) reste au programme, sans conviction de faire mieux, la prépa commence à se charger en termes de volume. Au final, on fait un peu mieux et on s’éclate en famille. On revient donc deux semaines plus tard à Tarbes (lire ici) pour l’objectif principal. On corrige le tir avec un 1h24 et on fête ça en famille. On peut donc partir serein sur un marathon. Lequel ?
26-08 : Montée du Phare
09-09 : Terre Iblee Tour (3jours, 3 courses)
30-09 : 10KM de Tournefeuille – 38’15
21-10 : Semi-marathon de Toulouse – 1h27
04-11 : 10KM de la Méridienne – 38’03
18-11 : Semi-marathon Lourdes-Tarbes – 1h24
02-12 : Marathon de Valencia – 3h08
Le marathon en bonus
Au début de la prépa, on partait sur le marathon de Porto (4 novembre). 3 mois de prépa, ça pouvait coller sur le papier. Mes derniers marathons remontent à 2016 avec de la réussite à Barcelone (ici) puis un échec à Rennes (ici). Il me faut donc du temps. Rapidement, on pousse vers la fin d’année pour se laisser le temps de revenir au niveau, retrouver de la vitesse et faire un minimum de foncier après les objectifs. Car le marathon, c’est en bonus, juste pour revenir sur la distance et dérouler. Si les objectifs passent, pas de raison que le marathon ne passe pas. Mais en fin d’année, les options sont limitées. J’élimine par défaut les marathons en France car je n’aime pas l’ambiance et c’est plus sympa de combiner course et voyage ! Je ne fais pas attentino à la date de clôture pour Valence, c’est la panique. Il ne reste plus beaucoup de choix et tout se passe en Espagne. Ça tombe bien, c’est le mieux niveau ambiance ! San Sebastian est proche de mon dernier semi et la météo est trop instable (vent). Valencia, plus de dossard, mais c’est un billard, il est magnifique et c’était mon objectif l’an dernier. Puis, Malaga, le dernier l’année : pas de vol direct depuis Toulouse, transport compliqué, mais ça reste une option. Mon sauveur arrive par magie grâce à la petite Marathoniack, Floriane Hot. Elle et sa team ont déjà leurs dossards. Un ami à elle, Roland est blessé : ni une ni deux, je mets une option et récupère le dossard. Un des avantages du marathon de Valence c’est qu’on peut maîtriser son inscription : changer de dossard, de SAS, etc. jusqu’au dernier moment. J’arrive donc in extremis à obtenir un dossard à mon nom. On se laisse néanmoins jusqu’au semi de Tarbes pour valider entre Valence ou Malaga.
J-3, j’y vais ou j’y vais pas ?
La prépa s’est bien déroulée. Les objectifs ont été réalisés. Un sans-faute ! 4 courses, 4 records. Il ne reste plus que le marathon pour finir en beauté. Le problème avec un semi à 2 semaines avant le marathon c’est le temps de récupération. D’autant plus que ce semi est particulièrement traumatisant. J’en paie les pots cassés : je finis avec une vilaine douleur à l’ischio jambier gauche. Le lendemain footing de récup, ça passe gentiment. Le mardi séance de 30/30 pour tester l’ischio, ça casse, ça panique : je sens que mon marathon s’envole. Repos complet. Nouveau test samedi avec un 2*3000, ça casse, je rentre en marchant/boitant, nouvelle crise de pleurs, Valence s’éloigne à nouveau ! On regarde pour Malaga, côté logistique c’est compliqué. Encore du repos ! Ça s’annonce mal pour faire un marathon avec tout au plus 3 séances marathon dans les jambes et une patte en moins. On prend les RDV médicaux qui s’imposent pour vérifier s’il n’y a pas de déchirure. Entre contracture, élongation et déchirure, difficile de distinguer à la sensation. Il faut se décider rapidement car l’annulation gratuite de l’hôtel c’est avant minuit. Un dernier test (2*3000) avant l’échographie : ça passe moyen mais ça passe. Je me dis que ça tiendra même s’il est fort probable que je termine en marchant. En revanche, je n’ai pas du tout l’allure marathon dans les jambes ; je suis trop rapide. Pas de déchriure à l'’échographie : j’ai le feu vert du médecin. Je suis moyennement rassurée et toujours pas décidée. J’ai la hantise de subir ce marathon, de gâcher ce moment à Valence sur un si beau parcours. J’ai surtout peur de finir en rampant comme sur une séance d’entraînement il y a 3 semaines … Je tente le coup : on y va ! Les bagages ne sont pas faits, le voyage n’est pas planifié, etc. Mais on y va ! C’est parti pour la route en voiture, direction Costa Brava, Costa Dorada et Costa del Azahar, et le soleil ! Valence nous voilà !
J-1 : Village Marathon
Aussitôt arrivés, retrait des dossards le samedi matin dès 9h pour éviter la foule. Le site de l’expo marathon est sur le lieu de l’arrivée à la Ciutat de les Arts i les Ciencies. Une arrivée unique sur le plan d’eau près de l’Umbracle et du musée Museu Príncipe Felipe. L’excitation ne monte rien qu’à penser à cette arrivée. Je me dis alors qu’il faut absolument le terminer ce marathon rien que pour ce moment ! La veille au matin, je suis fébrile et le doute m’envahi. J’ai cette hantise de ne pas arriver jusqu’au bout. J’espère chasser ces pensées négatives avec le footing. Nous faisons le tour du Village Marathon. Il n’y a pas énormément de monde à l'expo en début de matinée. Pourtant dimanche, il y auraa plus de 30 000 concurrents au départ. Nous filons directement au retrait du dossard. Là encore, personne dans ma file, ça va vite. Dossard orange pour moi, cela veut dire que je suis dans le SAS de <3h. On prend le temps de vérifier la puce puis direction le race pack. Pour retirer le tee-shirt et autres cadeaux de course, nous repassons par l’expo au rez-de-chaussée. Nous ne nous attardons pas sur les stands. L’expo n’est pas si grande et on y circule facilement. Le race pack est bien garni avec en prime une petite canette de bière ; original ! En sortant on jette un œil à nouveau sur cette arrivée spectaculaire. Aller en bus, retour en courant, ça fera le footing de la veille de compétition, 8KM. Footing dans les jardins de la Turia, une aire de loisirs très agréable et parfaitement adaptée pour le sport. On croise la Team Marahoniak avec Floriane et Nicolas Navarro, puis Liv Wespal qui fait ses derniers entraînements avant ses Europe de cross. Petit footing pour se dégourdir les jambes du footing et activer la circulation avant la grande course de demain.
Revue des objectifs
Au retour à l’appart hôtel, c’est l’heure du déjeuner, de la sieste puis des préparatifs. On profite pour adapter la stratégie de course à mon ischio : partir lentement quitte à faire un bon négative split pour mieux profiter et prendre du plaisir. On revoit aussi à la baisse les objectifs : <3h10
Objectif coach 3h05 (soit 4’22/km)
Objectif souhaité 3h02-3h04 (soit 4’20/km)
Objectif revu à la baisse 3h06-3h08 (soit 4’25/km)
Objectif minimum <3h10 (soit 4’30/km)
Guillaume va rouler l’après-midi. Je reste me reposer. Finalement, je repars trotter en début de soirée pour évacuer le stress et faire quelques lignes droites, histoire de tester la jambe. Repas un peu plus léger le soir et on se couche tôt. Le départ du marathon a lieu à 8h30.
Le jour J
Réveil à 6h. Inutile de me lever 3h avant car ça fait tôt et surtout je ne déjeune très peu. Au saut du lit, premier réflexe : vérifier la météo en sortant sur le balcon. C’est bien, il fait moins frais que samedi. Les conditions s’annoncent idéales : bonne température et quasiment pas de vent.
Un thé et un biscuit
J’avale une tasse de thé avec un biscuit Belvita (le moelleux au chocolat). J’avais croqué un bout de ce biscuit pour le semi de Tarbes, là j’innove, je tente le biscuit presque en entier ! L’allure marathon est tranquille et sollicite moins l’organisme, ça devrait passer. Dans l’idéal, il faut toujours tout tester avant le jour J et ne jamais changer son rituel. Depuis des années, je cours à jeun, entraînements, séances ou compétitions, du 10k au semi et même au half-ironman. Ce n’est donc pas un problème ni une faiblesse en course. Ni la nutrition ni la diététique ne sont mes points forts. Pour assurer, j’emporte toujours des gels sur moi.
La tenue de compétition
J’enfile ma tenue et plusieurs couches pour ne pas me refroidir en attendant le départ. Pas de questions à se poser pour la tenue de compétition : pour éviter à choisir, j’opte pour la même tenue que d’habitude : le short cycliste, le débardeur du club, la brassière shock absorber et mes vieilles chaussettes kalenji bien usées. J’enfile mon brassard avec mes deux gels (là encore jamais testé ; ils sont surtout là, juste au cas où : un salé et un sucré), plus un dans la poche si jamais je décide de jeter mon brassard en cas de gêne. Côté chaussures, je reste fidèle à New Balance : les NB1400. J’avais décidé de prendre les bleues, plus confortables et souples. Au dernier moment, je change d’avis pour les vertes (version différente). Même modèle, même kilométrage (quasi neuves, juste un semi chacune), sauf que les bleues me rappellent au mauvais souvenir du semi de Toulouse. Alors, j’opte pour les vertes, plus rigides, plus serrées et meilleure accroche. Même règle que pour le rituel du petit-déjeuner, ne jamais changer sa tenue au dernier moment ! Guillaume reste perplexe face à ces tergiversations.
Les temps de passage
Le temps passe assez vite le matin de compétition en fait. Je révise rapidement mes temps de passage. Je ne sais toujours pas sur quelle allure partir, alors je note les temps du semi au 40è sur ma main pour la fourchette 4’15-4’30, soit 3h-3h10. C’est large, ça me permettra juste de me situer en course. J’avoue qu’il y a mieux qu’écrire sur sa main. Je conseille les bracelets d’allure, ça évite que l’encre ne parte avec la transpiration. Bref, un écart de 15’’ entre les deux allures, ça fait beaucoup. Je ne sais pas comment réagira mon ischio alors je verrai à la sensation. L’idée étant de partir doucement et de ne pas paniquer si les concurrents « violets » (SAS <3h15) me doublent, c’est normal, c’est également mon objectif.
Direction le SAS de départ
Nous logeons en appart hotel à 8km du départ, près du Stade de la Turia. L’organisation offre les transports en bus de ville gratuitement et a renforcé les passages. Mais les bus s’arrêtent à 8h. Alors, on descend au pied de chez nous prendre le bus 95. Une longue file est déjà présente. Je vois mal comment on va tous rentrer dans les bus ! L’angoisse monte au fur à mesure que les bus passent sans s’arrêter car ils sont déjà pleins. Comme je suis toute seule, j’arrive à me faufiler pour avoir une place in-extremis dans le bus de 7h50. Il va directement au départ, là où je dois retrouver Guillaume qui va suivre le marathon à vélo. A peine je sors du bus que je tombe sur Floriane, la petite gazelle. Ça fait plaisir de voir une tête connue. Elle m’encourage, j’espère la revoir sur le parcours. Guillaume ne tarde pas. Je m’échauffe tranquillement puis retire les couches de vêtements au fur et à mesure. Il doit faire 8-10° ce matin. Il y a beaucoup de monde car le 10km part en même temps que le marathon. Par sécurité, à 8h10 je me dirige vers mon SAS. Et là, gros stress, c’est le parcours du combattant pour rejoindre mon SAS orange qui est dans la première vague de départ 8h30. C’est la première fois que je vois ça sur un marathon international. Il n’y a qu’un seul accès aux SAS, sur une seule allée. C’est le goulot d’étranglement. Les minutes passent. SAS Jaune, Vert puis Bleu. Je ne pensais pas être si loin de la ligne de départ. Enfin, mon SAS, il est 8h26. Je suis tout au fond de mon SAS, juste devant les violets. On ne voit rien devant nous, on n’entend rien non plus. Côté ambiance, je suis super déçue.
La course
Départ
J’active ma montre GPS, car il ne reste que 3min avant le départ. Je regarde autour de moi, il ne se passe rien. Tout d’un coup, les gens se mettent à marcher, je fais de même. Puis des concurrents « violet » sont à côté de moi et discutent. C’est bizarre, comment ça se fait que leur SAS est ouvert ? Ha en fait, le départ de la course a déjà eu lieu et on a rien vu, rien entendu, on marche. Là encore, je suis super déçue, rien à voir avec l’ambiance à Madrid ou Barcelone… Je peste intérieurement moi qui me faisais une joie de ce départ au-dessus de la cité des sciences .. Je ne vois rien, j’ai les yeux rivés au sol pour ne pas tomber. C’est normal avec cette foule, ça va se tasser dès le premier kilo. On passe le pont difficilement, je trébuche, ça joue des coudes et ça n’avance pas. Je redouble d’attention. Et qu’est-ce qu’il fait chaud ! J’ai gardé un manches courtes sur moi à jeter plus tard, mais en fait avec toute cette chaleur humaine et le stress de la chute j’ai l’impression d’être en nage. Finalement, moi qui avais l’impression de faire du sur-place, ce premier kilo passe en 4’25. Toujours autant de monde, j’essaie de zig-zaguer pour sortir de la masse. Résultat, 2è kilo en 4’06. Mais avec la foule, je n’entends même pas la montre ni ne vois les panneaux au sol.
5KM (21’20 : 4’25, 4’06, 4’17, 4’15, 4’17)
Les kilomètres défilent assez rapidement. On est toujours aussi nombreux et serré dans ce peloton. C’est casse-pied car il faut être vigilant et à chaque virage, changement de direction, il y a un effet de goulot et tout le monde ralenti. Certains préfèrent courir sur la piste cyclable à côté du parcours ! 4’06, 4’17, 4’15 … C’est trop rapide, je le sais. J’ai beau essayer de ralentir, je suis en 4’17. J’ai la sensation d’être absorbée par le peloton et poussée dans ce tempo qui n’est pas le mien. Le parcours est ultra plat, les avenues sont larges, et le revêtement bitume est très lisse. Sur cette première portion de course, nous longeons la mer … En fait, on ne voit rien. Ou alors, je suis trop concentrée sur mes pieds ! Passage au 5KM en 21’20, soit sur les bases de 3h. Autrement dit, rien à voir avec l’objectif du jour et rien à voir avec la stratégie du coach. Premier ravito du 5km impossible à s’extirper de la masse. Je zappe ce premier ravito, j’attendrai celui du 10km. Jusque-là tout va bien. J’ai réussi à jeter mon tee-shirt sans gêner les gens autour de moi. En revanche, Guillaume n’a pas pu suivre cette partie de la course. Il a dû aller directement au 10è.
10KM (42’30 : 4’14, 4’14, 4’15, 4’09, 4’15)
Toujours de longues lignes droites en aller-retour. J’arrive à voir la tête de course. Je cherche Nicolas Navarro qui vient chercher un gros chrono aujourd’hui, mais je ne le vois pas. Plus loin, je reconnais les maillots de Aix en Provence. Je distingue aussi les meneurs d’allure. J’ai repéré la flamme devant moi : c’est celle des 3h. Je veille à la laisser à distance mais elle n’est pas à plus de 100-200m … Le demi-tour est un peu brutal, surtout avec autant de gens autour. Mais les virages en suivant sont particulièrement larges et on ne se gêne pas pour couper le fromage. Il faut faire attention car il y a des bordures entre les voies et les pistes cyclables et aussi les spectateurs en bord de route. Pour le ravitaillement, là encore c’est compliqué. Mais au final, tout le monde se passe les bouteilles d’eau dans le peloton, pas besoin de s’écarter ni d’aller tendre une main.
15km (1’04’’05 : 4’18, 4’09, 4’18, 4’21, 4’21)
Pour cette troisième portion de parcours, on s’éloigne en direction d’un premier stade : des lignes droites ponctuées de rond-points. Toujours aucun intérêt touristique et toujours autant de monde autour de moi. Passage au 15è en 1h04, soit toujours sur des bases de 3h : ce n’est pas bon. Pour un départ modéré, c’est raté ! C’est à ce moment-là que mon ischio me lance une piqûre de rappel : une première gêne. Je sais que la douleur est là, c’est juste une masse, je la sens mais ça passe bien.
SEMI (1h29’’44 : 4’16, 4’26, 4’15, 4’13, 4’16, 4’12)
Petite montée au 17è, je lève le pied pour ne pas forcer sur l’ischio. C’est l’occasion de ralentir : faire 5km rapide, 5km plus lent, etc. Sur cette partie-là, on se dirige vers le stade du FC valence (qu’on ne voit pas au final) pour redescendre vers la plage (qu’on ne voit pas non plus), la Marina et les Arsenaux royaux. Coup de chance, j’aperçois enfin Guillaume ! Il regardait plus en arrière du peloton (forcément !). Il a l’air de bien galérer à suivre à vélo car le parcours utilise les deux voies de chaque avenue étant donné qu’on fait beaucoup d’allers-retours.
25KM (1’46’’55 : 4’19, 4’14, 4’14, 4’24)
Du semi au 25è, on se rapproche du départ pour longer les jardins de la Turia. Guillaume est de nouveau là au 24è et me confirme mon temps de passage du semi via l’application du marathon (live de la course). Il me dit de temporiser et que juste devant il y a Barbara, la Sicilienne ! Il commence à y avoir de plus en plus de supporters. Les zones de bandas sont plutôt petites. La musique est top : très bon choix des chansons ! Pas de percussions ni sons désagréables en course, ça fait du bien. Je profite du prochain ravitaillement pour prendre mon gel. J’ai décidé d’essayer de prendre régulièrement un gel (enfin un au 25, et un vers le 37). Difficile à appuyer avec les dents pour prendre ce gel. Tant pis, j’en prends à peine une goutte et je le jette à la poubelle. Petite déception, ce n’est pas l’explosion en bouche ; mince, il n’est pas si goûtu et finalement ça ne me réjouit pas plus que ça de l’avoir pris. Je me rince bien la bouche car il est assez pâteux. Passage au 25è en 1h46’55, soit toujours sur des bases de 3h. Je vais essayer de ralentir lors des prochains 5kms. Je n’arrête pas de me répéter que tout commence au 30è voire 32è, que le marathon est une course d’attente. Alors, je lève le pied.
30KM (2h09’30 : 4’28, 4’38, 4’32, 4’28)
Du 25e au 30e, on contourne vraiment le vieux centre-ville, le Valence historique. C’est une partie un peu plus sinueuse, les routes plus étroites. Au final, on ne voit pas tant que ça les monuments. J’ai bien réussi à temporiser. Avec ces relances, l’ischio se réveille au 27è : première alerte, je ralentis en 4’38. Je me ressaisi et me dit de tenir jusqu’au 30è et on verra d’ici là. Passage en 2h09’30, soit sur des bases de 3h02. Avec cette baisse d’allure, les 4 filles qui m’entouraient ont pris la poudre d’escampette, mon moral avec. Une Barbès Runner, Laura, me double avec une belle allure. Mon moral en reprend un coup. Et je commence à me focaliser sur ma douleur. La cuisse se raidit et devient lourde. Je pousse jusqu’au 30è en me disant de m’arrêter au ravito pour m’étirer, secouer la cuisse et repartir. Les ravitaillements sont tous les 5KM mais avec les tables des élites (>300 coureurs) et des « personal best », le ravitaillement s’étale sur 1KM.
30-35km (2’33’55 : 5’07, 5’06, 4’40, 4’55, 4’36)
Comme anticipé, je m’arrête donc au ravitaillement. Rien à faire, ça ne passe pas, je redémarre. Je lève la tête et je reconnais le parcours : on se dirige vers notre hôtel ! L’envie me démange de rentrer. 5’07 au kilo, mon marathon est plié. La cuisse est lourde, la foulée ne revient plus, j’ai mal, je me fais doubler et Guillaume n’est toujours pas là. Je broie du noir. Ha tiens voilà Guillaume au 32è : je m’arrête à nouveau, je parlemente, j’explique, je râle, je marche, je recours. Guillaume ne suit pas à vélo. Je m’arrête à nouveau pour voir ce qu’il fait, où il est. 5’06 au kilo … Bon, je recours, 4’40, ce n’est pas si mal. Pas de chance, on aborde ici la partie la plus difficile du marathon, celle ou ça ne fait que grimper très très légèrement tous les kilomètres. Guillaume est à nouveau là et essaie de me faire entendre raison : même avec ces arrêts je suis toujours sur les bases de 3h06 ! Je cours jusqu’au prochain ravitaillement : je vois le Powerade. Je dois éviter d’en boire, ça me rend malade. J’entends dans ma tête, « pas le powerade, pas le powerade », et qu’est-ce que je fais, je m’enfile le powerade : malin ! Guillaume est à nouveau là, il ne reste plus que 6km, même en 5’/kilo je suis sous les 3h10. Allez, je me bouge. Passage en 2h33 au 35è soit sur des bases de 3h06. Plus Guillaume était là, plus je marchais. Il l’a vite compris et a pris le large.
35-40 (2’58’’05 4’59, 5’01, 4’58, 4’40, 4’27)
J’ai mal, il commence à faire chaud, je m’arrose : malin, je suis trempée. Je vois autour de moi beaucoup de coureurs en détresse. Des secours sur le bas-côté soignent certains coureurs. Je me dis que ça pourrait me faire du bien une bombe de froid sur l’ischio alors nouvel arrêt. Haa c’est du chaud et ça colle ! Puis je vois un homme devant moi à l’agonie, lui il souffre beaucoup. Petit électrochoc : je ne souffre pas autant. C’est alors que je me ressaisi tout en cherchant Guillaume sur le côté. Je ne le vois plus. Je le cherche car j’ai oublié où le lieu du point de rencontre après l’arrivée. Au lieu d’être concentrée sur ma course, je pense à l’après course : encore tout faux au niveau du mental. La fin de parcours est avantageuse à partir du km36 avec léger faux plat descendant. Le public est de plus en plus nombreux. Je relance la machine et remobilise le cerveau. Je suis trempée, j'ai le maillot qui colle et c'est désagréable. J'oublie un temps ma douleur à l'ischio pour détourner mon attention sur la gêne du tee-shirt. ça marche, je n'ai qu'une envie c'est d'en finir. Je double de plus en plus de monde, mais c’est le slalom, les rues sont plus étroites. Passage au 40KM en 2h58. Je fais vite le calcul pour comprendre qu’il faut que je me bouge si je veux au moins faire sous les 3h10. J’ai l’impression de ne pas avancer mais si je vais un peu plus vite que 5’/kilo et que je double du monde.
40-42 (3’08’’48 : 4’16, 4’11)
Les deux derniers kilo sont à la fois extraordinaires et frustrant. Il n’y a plus de large avenue : avec la foule, ça ressemble plus au tour de France avec un couloir resserré pour les coureurs. Impossible de doubler. Je vois les secondes défiler. Je vois également la cité des sciences qui de dresse devant nous et repense à cette arrivée magique sur l’eau. Légère descendre pour basculer dans la Turia et arriver au pied de la cité. A partir de ce moment, il y a des barrières, le public est plus éloigné. En bas, ce sont des pavés, ça surprend. Les mètres défilent avec des panneaux tous les 100m. Je suis encore à regarder ma montre car on ne voit pas au loin l’arrivée. Il y a un gars qui ne veut pas me laisser passer, alors j’accélère, je donne tout. A 300m on voit l’arche dans l’angle du virage. A 200m on entre sur la fameuse passerelle suspendue au-dessus de l’eau. Ça fait un drôle d’effet, ça rebondit. Je suis fixée sur le chrono au loin, mais il est trop petit. Je sprinte comme je peux, tant pis pour la photo finish ! Je passe enfin la ligne : 3h08 à la montre.
Bilan
Temps réel : 3’08’49,
Temps officiel 3’09’’51.
97è Feminine,
39 SEF,
2637è au général.
Vidéo de ma course: ici
3h08, record personnel comme de très nombreux coureurs ce jour-là et objectif rempli, moins de 3h10. La satisfaction est là : celle d’avoir fait mieux, d’avoir atteint l’objectif minimum. La déception est quand même là car j’ai commis beaucoup d’erreurs même si je partais avec un ischio fragile. Avec le recul, je relative, car un an en arrière, j’étais alitée, en arrêt total. J’analyse aussi les erreurs :
Départ trop rapide
Stratégie du coach non respectée
Faiblesse du mental
Oubli des méthodes de mental pour occulter la douleur
Des erreurs que j’avais commises au semi de Toulouse puis corriger aussitôt au semi de Tarbes. Je vais donc travailler sur tous ces éléments pour repartir au plus vite vers un nouvel objectif marathon avec cette fois-ci une prépa axée marathon et du travail d’allure spécifique.
Place à la récup
Je finis par retrouver Guillaume après la course. Nous n’avions pas vraiment préparé ce voyage ni cette course et encore moins l’après course alors ça sera 7km à pied pour moi, toute trempée pour rejoindre l’hôtel ! L'après-midi, direction la plage pour tremper les jambes. Le lendemain, c’est récup’ active avec visite du centre-ville de Valence et surtout la grimpette des 207 marches de la Tour Micalet ! La suite, ça se passe à vélo pour explorer la ville et les alentours de Valence. On se rend compte que c’est un spot idéal de sport, surtout en hiver !
Clap de fin sur cette mini saison 2018, avec 5 courses 5 RP.
Valencia, le nouveau Berlin ?
Pour conclure sur ce marathon, mon 4è marathon en Espagne après Madrid, Seville et Barcelone, on peut annoncer Valence comme le nouveau Berlin. La pluie de records personnels le confirme.
Conditions météo idéales : 8 degré au départ, 15 à l'arrivée pour les premiers, 24 pour le milieu de peloton comme moi. Soleil rasant, plusieurs zones d’ombre, quasiment pas de vent, abrité par les bâtiments
Une organisation favorisant les chrono avec des lièvres pour différents groupes
Un programme de « Personal Best » et une grosse densité de coureurs
Des coureurs, comme à Berlin, motivés par la perf et non par l’ambiance
Des élites et amateurs motivés par la perf plus que par la place
Parcours ultra plat avec de larges avenues, un revêtement bitume très lisse et sans pavé
Une fin de parcours avantageuse à partir du km36 avec léger faux plat descendant et très léger vent de dos
Une arrivée exceptionnelle
Une ambiance de folie, un public nombreux
Liens
Site de la course : https://www.valenciaciudaddelrunning.com/fr/nouvelles/10-raisons-courir-marathon-valencia/
Article de presse : https://www.ouest-france.fr/sport/running/marathon-la-belle-ligne-bleue-de-nicolas-navarro-valence-6111647
Strava : https://www.strava.com/running-races/2018-maratn-valencia-trinidad-alfonso